Les Archétypes selon Vladimir Propp
Nous avons déjà vu que Propp a identifié dans son livre : « La Morphologie des contes de fées » que les contes de fée suivent une structure composée d’au maximum 31 étapes (ou fonctions) qui se déroulent selon un ordre immuable.
Sur cette structure fixe, s’y articule selon Propp des variables : en réalité des archétypes. Des figures universelles, qui incarnent des fonctions, remplissent un rôle dans la narration.
Quelles sont ces variables ?
Propp en dénombre 7 au total. Leur position, leur présence et leurs limites ne sont pas fixes : un personnage peut remplir différentes fonctions, ou plusieurs personnages représentent une fonction.
- Le Héros
Celui qui va réparer le méfait réalisé par l’Agresseur. Le Héros est bien entendu le protagoniste. Propp distingue le héros-quêteur (qui décide spontanément d’agir) du héros-victime (qui est contraint de réagir).
- L’Agresseur
L’adversaire du héros, celui qui est à l’origine même du méfait, celui qui tente d’empêcher le héros de le réparer.
- Le Mandateur
Il charge le héros d’accomplir la quête : réparer le méfait, comme par exemple ramener la princesse prisonnière de l’Agresseur.
- Le Donateur
Le héros le rencontre sur sa route. Le donateur le met à l’épreuve avant de lui offrir un présent : l’auxiliaire magique, qui va l’aider à accomplir sa quête.
- L’Auxiliaire magique
Un objet enchanté (un épée), un être magique (un cheval ailé), un don (invincibilité) qui va aider le Héros à achever sa quête.
- La Princesse et son père
La Princesse est, de manière symbolique, l’objet de la quête du héros (la libérer des griffes de l’agresseur : réparer le méfait). Puis, le roi, son père, offre la main de la princesse au héros : le héros est reconnu ou anobli (récompense suprême).
- Le Faux Héros
Parfois le héros du conte de fée a un rival (l’un de ses frères). Le faux héros se fera passer pour lui afin d’exiger la récompense (la main de la princesse), mais sera finalement démasqué.
En quoi rejoignent-ils ceux de Vogler et Campbell ?
Nous savons que J. Campbell a une vision très jungienne des archétypes qu’il présente dans « Le Héros aux mille et un visages ». Le Père, la Déesse Mère remplissent des rôles symboliques, psychologiques.
Quant à Propp, il adopte une approche narratologique, puisqu’il étudie des œuvres de fiction (les contes folkloriques). Propp s’intéresse à la fonction dramatique des archétypes.
Vogler, lui, réalise une synthèse entre ces deux points de vue : dramatique et psychologique. En outre, l’éventail des archétypes de Vogler ressemble plus à celui de Propp que celui de Campbell.
Vogler, Campbell et Propp : même combat ?
Ce serait trop simple. Si Vogler tente d’adapter la théorie de Campbell (à l’origine appliquée aux héros des mythes) à l’écriture narrative, les travaux de Propp se déroulent avant et donc indépendamment des recherches de Campbell.
D’abord, il y a une évidente similitude entre les travaux de Propp, Campbell et Vogler. Les trois auteurs mettent au jour une structure narrative typique, dont la succession des étapes est immuable, à la différence que celle de Propp contient plus de scènes (dont certaines optionnelles).
Ensuite, Vogler fait la synthèse entre la vision fonctionnaliste de Propp (la fonction des personnages clés de l’histoire) et l’analyse plus symbolique et psychologique des archétypes que Campbell emprunte au psychologue Jung.